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Mango
29 mai 2006

Shameless

Voilà. C'est arrivé. J'ai repoussé les limites de la honte et de l'embarras, en vivant un grand moment de solitude samedi soir. Le genre d'évènement, de remarque inappropriée, de manque de a) tact, b) jugeote, c) sens commun, ou d) a+b+c, qui vous fait violemment rougir et vous donne envie de disparaître de la surface de la terre, de rembobiner le fil du temps pour ne pas avoir fait ou dit ce que vous avez fait ou dit, de vous cacher sous la moquette pour y mourir, ou encore finir vos jours ermite de peur de croiser un jour un de vos congénères qui pourrait avoir eu vent de votre lamentable performance.

J'ai fait un top-3. Et mon numéro un vient d'être remplacé haut la main, les doigts dans le nez. A vous de voter.

Ancien numéro 1.
Yogyakarta, Indonésie, août 2004. Toute ma famille est invitée à un mariage traditionnel javanais, et celui-ci est de très grande classe. Comme il est de bon ton de flatter vôtre hôte, mon frère et moi-même partons à la recherche d'une tenue appropriée, à savoir alliant subtilement tradition et modernité tout à la fois. Super facile, hem. Je vous passe les détails de la croisade, mais Ben finit en pantalon en lin et veste à col mao, tandis que j'opte pour le sarong local en batik, avec une veste en lin noir à boutons chinois. Parfait, nous voilà parés, et diablement chics. Enfin reste un détail, apprendre à nouer le satané sarong, ce qui n'est pas une mince affaire. Mais quand même, après 3452 essais (au jugé), je commence à comprendre comment rabattre le pli, faire le premier noeud, replier, et renouer. Cool. Pour les novices, un sarong c'est en gros une pièce de tissu cousue de façon à former un tube très large, que vous enfilez comme une jupe longue et repliez autour de votre taille avant de nouer. Dernier détail qui fait tout le charme de cette tenue, on la porte à cru, comme le kilt.
Vers 19h, tout le monde est fin prêt, et un van nous attends même à la sortie de l'hôtel pour nous emmener à la réception (quand je vous disais que c'était grand standing). On traverse la ville illuminée pour arriver devant une énorme et magnifique pagode en bois surélevée, où se déroulent les festivités. Emerveillés, on descend de la voiture en rajustant nos tenues. La pagode est desservie par une volées de marches où une foule se dirige cérémonieusement vers l'entrée, on a l'impression d'être à Cannes en plein Festival. Alors que je m'apprête à gravir les marches tout aussi cérémonieusement (entendez: en me la pétant grave), je découvre pour la première fois la joie de monter un escalier avec une jupe longue, marche sur mon sarong et manque de m'étaler. Pas très concluant. Je décide donc d'opter pour le style Scarlett O'Hara, en soulevant mon jupon de part et d'autre en montant l'escalier, ce qui me donne la démarche assurée d'un cormoran fraîchement mazouté. Arrivés en haut, la fête bat son plein, il y a assez de boissons et de nourriture pour sustenter tous les enfants de l'UNICEF, et les décors sont somptueux. Le couple de jeunes mariés pose en costume javanais sur une petite estrade richement ornée et couverte de roses blanches devant laquelle une file d'une cinquantaine de mètres d'invités patiente pour aller les saluer. Le processus est très long. Du coup on se disperse dans la foule et avec Camille (ma petite soeur) et Ben (mon petit frère), nous prenons d'attaque le stand à satays. [punaise, sacré intro pour toujours rien vous vous dites ? Attendez, ça va venir]
La soirée est loin d'être finie, mais la fatigue frappe les troupes et on décide de lever le camp. C'est à ce moment précis qu'on se rend compte que ma seconde soeur et ma mère sont introuvables. Nous nous dispersons pour les rechercher, et je décide d'aller fouiller le jardin. Et là, dans la précipitation, je commence à descendre l'escalier à contre courant de la foule digne qui monte, oublie de soulever mon sarong, et marche dessus de tout mon poids. Les noeuds déjà sensiblement lâches après ma première mésaventure se défont sans la moindre résistance, et avant que j'aie pu faire un geste pour l'empêcher, je me retrouve cul nul, la chauve souris à l'air, face à une bonne cinquantaine de dignitaires Indonésiens. Le foule se fige. Et voilà. Juste . LE moment. LA seconde où tout bascule, où, rien que d'y repenser, vous avez envie d'aller vous coller la tête dans la cuvette des WC et de vous y noyer. Le temps se fige. Je rougis violemment, essaie d'attraper les bouts de mon sarong tout en tirant sur le bas de ma veste pour couvrir ce qui ne s'est pas recroquevillé de honte à l'intérieur, loupe trois marche, retrouve miraculeusement mon équilibre et disparaît dans la nuit drapé dans mon sarong et ce qui me reste de fierté... a savoir pas beaucoup. Quand je finis par retrouver les deux fugitives, je leur passe un savon hystérique pour évacuer mon énervement.  Mais ça ne suffit pas, encore maintenant je me tasse de honte sur mon fauteuil en y repensant.

Voilà mon top 1. Enfin, jusqu'à avant hier. Voici en avant-première mondiale le nouveau, bien plus intense, plus riche en goût, à la délicatesse incomparable.

Nouveau numéro 1.
Samedi soir, mon pote Camerounais que je ne présente plus, me demande de venir lui filer un coup de main dans son restaurant. Il reçoit 50 personnes pour un anniversaire et veut faire une petite soirée privée, mais a besoin d'un barman. N'ayant rien de spécial de prévu, j'accepte et lui propose d'emmener mon iPod pour le brancher sur sa sono. S'agissant d'un anniversaire, je prépare à l'avance une petite série de playlists 'pendant le repas', 'juste après le repas', 'Paartyyyyyy!' et enfin 'fin de soirée'. Oui, quand je m'investis moi, c'est à 200%. Bref, le j'arrive le jour J à l'heure H avec le matériel. Les clients et invités ne tardent pas à arriver, et on me présente Miranda, la jeune fille trisomique qui fête ses trente ans. Elle est gentille comme tout, absolument pas comme ses parents, un couple de Sud-Africains arrogants et puant le fric, du genre qui ne vous regarde pas en commandant à boire mais qui vous brandissent une liasse de billet et vous l'agitent sous le nez. La grande classe. J'attaque ma besogne de barman slash disc-jockey plein d'entrain, quand la maman de Miranda déboule au milieu de la playlist 'pendant le repas', constituée principalement de jazz et de blues entraînant, et me dit tout de go qu'elle a horreur de cette musique et qu'elle a bien fait de prendre la sienne. Hum. Elle me tend un double CD et me demande de le mettre. 'Et quand il est fini, vous le repassez, OK?' Oui, ma'am. Je me retiens de lui donner une leçon gratuite de savoir vivre, mais serre les dents. Et là je jette un oeil à la pochette et frôle la crise catatonique.

Shania Twain, the very best of. [NOOOOOOOOOOOOOOOON ??!!!! Siiiiiiiiiiiii.]

Argl. Je vais mourir, mon organisme va rejeter en bloc cette agression auditive et je vais faire un choc anaphylactique. Bon, bon, me reprends-je, qu'est ce que c'est que cette intolérance primitive ? Après tout ce n'est pas ma soirée, et s'ils ont des goûts de chiottes, cest probablement la faute d'une éducation discutable, et donc pas de la leur. Bref. Je m'exécute tout en essayant de conserver un demi bout de sourire pendant qu'ils mangent sur les hurlements de Shania.
Au bout d'un temps qui me semble aussi court que la totalité du Précambrien (et croyez-moi, TROIS fois de suite ce foutu best of, c'est long), ils posent ENFIN leurs cuillers à dessert et un mouvement semble animer les convives. J'entends murmurer 'peut-on danser ?', oui, Miranda veut danser, on va danser! On repousse les chaises, les tables, mon âme de DJ remonte à la surface à la vitesse grand V, et j'attaque la playlist 'Paaaaaartyyy!'. On se trémousse sur Beyoncé Knowles (derrière mon bar j'ondule gracieusement et en rythme tout en servant des margaritas, Tom Cruise peut aller se rhabiller), sur de la techno moisie-mais-qui-bouge, et sur Shakira [joj petit intermède ici pour préciser que je n'écoute ni Shakira ni Beyoncé en temps normal, mais que dans une soirée dansante ça le fait pas mal. Non je ne me justifie pas, je fais ce que je veux d'abord joj]. Et soudain, les Black Eyed Peas. Je redouble d'efforts et danse frénétiquement derrière le bar avec une bouteille de bitter en guise de microphone, quand soudain mon cerveau note une petite tension inhabituelle du côté des convives. En effet, les invités me regardent tous en faisant des geste frénétiques pour que je coupe la musique. Je me fige en voyant mon copain qui se passe l'index à l'horizontale sur sa pomme d'Adam avec un regard épouvanté... Et soudain je comprends, alors que la voix du chanteur des Black Eyed Peas s'élève :

LET'S GET RE-TAR-DEEED, LET'S GET RE-TAR-DEE-EEEEE-EEEED!

Et Paf. Rebelote et dix de der. Cette bonne vieille sensation. Mon sang se fige, je me décompose. Miranda est toute blanche. Cramoisi j'essaie d'atteindre l'iPod et de lui couper le kiki, il tombe derrière le bar, hors d'atteinte, et je suis obligé d'éteindre l'ampli à coups de pied. Le silence est cinglant. Je viens de passer 'let's get retarded', la chanson la plus controversée de ces 12 derniers mois aux US, à l'anniversaire d'une demoiselle trisomique. Je veux mourir. Là, tout de suite, foudroyé. A ma décharge, ce morceau est de la bombe et idéal pour se trémousser. De plus, et je le jure la main droite levée et l'autre sur la Bible, la Torah le Coran ou tout ce que vous voudrez, que je n'ai jamais eu vent du scandale inhérent à la chanson avant qu'ils ne changent les paroles en 'let's get started', et pour être honnête, je n'ai même jamais fait attention aux paroles avant ce soir-là. Encore une fois, je disparaît dans la nuit comme un chacal syphilitique, mort de honte.

... no comment. Pour les non anglophones ou ceux qui auraient loupé l'épisode de la censure de cette chanson, les paroles, grosso modo, disent ceci : 'devenons débiles, retardés, neuneus, stupides, agitons la tête bêtement tous ensemble' etc.
Maintenant que vous savez tout je vais me faire pâtre en Ouzbékistan, où personne ne me trouvera plus jamais. L'autre option, c'est que toutes les personnes qui lisent cette note me racontent également leur moment de gêne suprême... parce que mince, il n'y a pas de raison !!!

Voilà. Sinon le Mozambique c'était fantastique, j'ai plongé au milieu de raies manta géantes par 30m de profondeur, mangé des langoustes longues comme mon bras, et passé (comme à chaque fois) quelques heures dans un garage... mais c'est une autre histoire. Promis, vous l'aurez avant Noël prochain. Un petit avant-goût visuel gratuit suit.

sunset_tofo

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Commentaires
C
Punaise, tu sais quoi ? ton histoire de mouchoirs flottants m'a fait me souvenir d'une aventure quasi similaire et absolument hilarante, qui -pour une fois- ne m'est PAS arrivée à moi, mais à une copine, et j'en étais le seul témoin... Mais je ne peux pas la mettre ici c'est trop savoureux, il va falloir que j'en fasse une note dès que j'ai fini la série Australienne... J'en glousse d'avance !! (vais te torcher l'Australie vite fait, tu vas voir...)
F
Au bangladesh, a Dakka, à l'embassade en train de faire vérifier les billets de retour.... une énorme et irréprésible envie de ... faire caca, du genre celle que si tu n'y vas pas dans la seconde tu déclenche un incident diplomatique....<br /> Je cours aux toilettes, laissant en plan le mec derrière le bureau et je fais ce que j'ai à faire dans des toilettes turques mais cependant de grand standing... Mais voilà, je n'avais pas prévu cette excursion dans mon planning et je n'ai pas de papier... pas d'eau non plus (mais comment font-ils ?????????? ils se lèchent ou quoi !!???!!! ) Résultat je leur ai laissé comme souvenir 2 mouchoirs en tissu qui m'ont été bien utiles meme s'ils ont refusé de disparaitre dans le trou et sont restés étendus sur le bord en me regardant partir.
C
... euuh bon OK, c'était peut-être pas un albatros, mais en tout cas la bestiole était constipée depuis un moment. Voilà.
C
... mais je me suis assis dans un étron d'albatros, un truc absolument monumental qui séchait sur un petit muret, juste avant d'aller dans un restau très chic de l'Île de Skye. Sensations garanties, j'en avais jusqu'au genoux... partageons, partageons !!!
F
Alors en fait, je crois qu'il faut partager ses experiences de ridiculisme absolu pour les exorciser, comme cette fois, où, à l'aéroport de Bamako, je me suis assis sur le tarmac (on attendait notre correspondance pour Ouagadougou) et me suis relevé pour marcher ... J'avais le cul plein de goudron ! ça a duré tout le trajet !
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